jeudi 26 mars 2020

Le paradis des aïmaras



           C'est clair, j'ai délaissé le blog, l'écriture en général depuis le début de notre trip. Faute de temps mais aussi une volonté de vivre le moment présent. La vie à 3 en camping car est plus que prenante. Une sorte de pré confinement mais aujourd'hui c'est bien différent, ce virus fout un peu la merde ; un peu beaucoup même. Alors courage à tous car c'est évident, il va en falloir. Profitons en pour faire le point ; sur nos vies et sur le temps que vous avons de disponible.
Qu'en faisons-nous ? A qui le donnons-nous ?

Je vais de mon côté tenter de redonner petit à petit du temps à la régurgitation de toutes ces découvertes, parties de pêche et rencontres de folies de ces derniers mois!
En Novembre dernier j'ai eu l'immense chance de revenir en forêt Amazonienne alors c'est parti, attachez votre ceinture !


J'vais pas vous la jouer description de voyage avec tout le côté rébarbatif des attentes en aéroport avion train etc etc... Aussi, on sait tous qu'aujourd'hui la planète va mal et que par conséquent notre passion en prend une belle... 
De claque ! 

On entend aussi dire que prendre l'avion n'est plus à la mode en Suède histoire de moins culpabiliser sur notre bilan carbone. Mais, car il y a toujours un mais ; l'âge avançant et se souvenir si profond de cette aventure en jungle m'ont poussés à bloquer une réservation chez Dhdlaika. (Jetez un coup d’œil ici.)
Évidemment c'est avec Julien Rossignol comme guide que nous prendrons la direction du fleuve Sinnamary et ses redoutables Aïmaras !

Dans ma tête ce poisson c'est de la violence. Un pur concentré pur jus méga pur de tout ce que j'aime dans la pêche. 
Cependant avant d'arriver en terre promise j'ai un doute.

Est-ce que mes souvenirs ne se sont pas un peu emballés ?
Est-ce que ce fish est si extraordinaire que ça ?

Ça va faire en effet 10 ans que j'y suis allé et l'adrénaline est à bloc ! D'ailleurs voici le lien vers ce vieux papier.






Sur place c'est d'entrée le barrage de petit saut qui vous embarquera dans un décors de fou ! Une forêt noyée à perte de vue. Un cimetière pour certains et pour les pêcheurs un poste gigantesque. 
Plus de 3 heures de traversées. Environ 70 kilomètres quasi jamais pêché puisque les conditions de vie n'étaient pas optimales. Sûrement des surprises dans les années futures maintenant qu'un équilibre se crée et qu'un écosystème stable s'est installé.

Donc; traversée jusqu'à ce que l'on retrouve le lit du fleuve, portage de tout le bordel... Ah oui j'avais dis pas de description !!! Ouais mais bon c'est sport et il faut bien le préciser !! En tout cas plus on va loin moins il y a de pression de pêche et ça, ça compte et pas que dans la tête !













Il faut que je vous parle de la troupe !
On est 7 avec les deux guides que voici ; Julien Rossignol qu'on ne présente plus tellement il a fait ses preuves autant niveau expéditions jungle orientées naturaliste que niveau pêche de l'aïmara qu'il maîtrise à merveille !
Puis il y a Ronan, guide nature de métier, présent depuis une quinzaine d'années sur le barrage et également excellent guide de pêche !
Les gars sont costauds et il le faut ! Tirer des barques de 250 kilos, monter un carbet sur place, porter les moteurs sur l'épaule faire la bouffe et enchaîner des journées de dérives à la rame demande une sacrée condition physique.

De notre côté il y a Alex mon pote pêcheur de carpes à la mouche, Morgan mi gardois/mi ardéchois /mi rugbyman, Adrien la force tranquille un poil bordélique lol et Enzo ; un sacré personnage....
Une belle équipe de fous furieux qui fait des étincelles ! Une rencontre sur le tas sans prise de tête avec comme seul objectif : Passer une superbe semaine avec ce poisson hors normes dans un cadre incroyable.










Évidement à peine arrivés sur place on a qu'une idée en tête ; pêcher !!! Mais il nous faut d'abord monter le camp. On est en pleine jungle à côté d'un saut (saut dalle) avec une belle petite plage de sable blanc et des gros blocs de granite vieux de 2 milliards d'années. C'est juste magnifique ! 
Tout le long de la traversée j'ai eu les larmes au yeux sous ce spectacle majestueux que nous impose la jungle.
Petite balade le long de la rivière canne en main, on prend nos marques mais aucun poisson ne se décidera. On s'en fout, c'est tellement beau ! Puis, première nuit dans les hamacs et j'avoue qu'on est un peu perplexe face à une semaine à dormir en pleine forêt primaire dans des bouts de tissus accrochés aux arbres...
Finalement nos peurs/doutes s'effaceront dès le premier dodo dans une sérénité assez paradoxale. Une sensation de bien être et de sécurité m'a emporté chaque soir. La jungle à cette époque est tout ce qu'il y a d'agréable. Il fait certes très chaud quand le soleil nous touche mais les orages quotidiens et les nuits fraîches rendent tout cela bien plus sympa que tout ce que l'on peut imaginer. Les bestioles, les moustiques ; le danger tant fantasmé n'est pas plus présent que dans votre salle de bain... Ouais j'avoue il y a quand même un peu plus de monde...

C'est le lendemain à 5h30 que tout commence vraiment. La brume nous entoure, le chant lointain des singes hurleurs s'estompe laissant percevoir les premières lueurs du jour. Le matos est fin prêt et les réflexes nous mènent au café !

Matos
Je pêcherai essentiellement avec deux ensembles casting.
Un combo composé d'une SG (Savage Gear) Mpp 100gr avec un moulinet casting Okuma Citrix 364. Tresse SG jigging en 34ct et pour le bas de ligne le SG Carbon 49 (23kg), un super BDL qui se noue donc ça va vite et j'évite les sleeves. On finit sur un bon anneau brisé et en avant.
Cet ensemble sera utilisé avec tout ce qui est leurres souples en texan, stickbait et popper. J'ai vraiment été bluffé par le côté polyvalent et indestructible de la mpp ! J'ai forcé dessus comme un âne et elle n'a pas bronché. Un imbattable rapport qualité prix !

Mon deuxième combo est composé d'une canne travel (4brins) de 300gr de puissance (que l'on ne trouve qu'en Asie) sur laquelle j'ai calé un Okuma Komodo 364 (le top du top). Je me suis dirigé vers ce modèle de canne car elle est composé de 75% de fibre de verre ce qui est très agréable pour pêcher avec des leurres qui vibrent beaucoup mais aussi pour éviter un maximum les décrochés. Gros spinnerbait, gros chetterbait, gros lipless, gros crank ; le genre de leurres qui vous déboîtent l'épaule au bout de 15 minutes. 
Bref avec le Komodo c'est du beurre et les 300gr de puissance sont bien utiles face à un énervé ! Pour la suite même BDL.

Les leurres utilisés sont divers et variés ; comme je le disais plus haut ces poissons sont très réactifs aux vibrations mais c'est en surface que vous aurez le plus de sensations ! Les attaques sont démoniaques et il faudra insister ; au moins lorsque la luminosité n'est pas trop importante. Pour ça évidement ce sera sur les coups du soir et du matin.

Pour le choix des leurres c'est vous qui avez la carte du menu entre les mains puisque ce poisson a la faculté d'être présent partout dans le fleuve. Vous adorez le stick bait ; vous ferez du fish au stick. Vous adores la pêche en texan ; vous ferez du poisson en texan ! 
Je vous mets ici le lien vers un autre article que j'ai écris sur le blog de DHD laika, peut être plus technique et qui sera bien complémentaire.



Donc bref de bazardises de matos passons à la pêche !!!
Je suis sur la pirogue avec Alex et on a Julien en guide ! De mon côté c'est direct sur du top water avec une folle envie de prendre une grosse sanction en surface. Alex est au SG Da bush , enfin oui au spinnerbait. Sûrement celui qui est le plus utilisé pour ce fish tellement les résultats sont réguliers. Ce sera d'ailleurs le leurre qui remportera le plus de poissons.
Alex enchaîne les aïmaras, il se régale et commence à comprendre pourquoi ce poisson rend fou. En revanche, en surface rien ne se passe.... Alors bon... Je passe au Da bush et quelques minutes plus tard tiens mon premier poisson ! Quelle joie de retrouver ce fish qui a traversé les ages. La journée découlera sur ce rythme avec pas mal d'activité. On prend notre panard sévère !



Contemplatif ! Voilà ce que je suis de plus en plus que je sois ici en Amazonie où chez moi au bord du Vidourle. Après, je vais être honnête sur cette semaine j'ai opté pour le mode machine. J'ai recherché les caches les plus difficiles, les endroits bien encombrés. C'est un réel plaisir que de pouvoir mettre en pratique ici ce que la pêche du black bass nous a appris. Le repos se fera plus tard, chaque seconde compte, chaque lancé doit être précis. Le pêcheur d'aïmara se doit d'être attentif avant même que le leurre touche l'eau car quand ça pète ça peut faire très mal!

Retour au camp et débrief sur cette première journée : Une douzaine de poissons il me semble avec une grosse majorité de poissons pris au spinner.
Ensuite les journées s’enchaîneront de cette manière :
-Petit dej à l'aube, vers 5h30
-Pêche jusqu'à midi
-Repas et sieste
-Reprise de la pêche vers 15h30
-Retour juste avant la nuit
-Apéro/débrief !!!! Repas et gros dodo !
Un rythme assez éprouvant mais on est là pour ça !



















Parlons score : Sur l'ensemble du séjour la pêche n'aura pas était folle car on comptabilisera une centaine d'aïmaras ce qui donne à peu prés 20 poissons par personne sur 6 jours de pêche.
Par contre la qualité du poisson était de rigueur puisque nous ferons 9 poissons de plus de 10 kilos dont les plus gros étaient entre 12 et 14 kilos.
Les semaines sont toutes très différentes car ce score peut se faire en une seule journée. Il y a certes une petite pression de pêche puisque plusieurs séjours ont lieu ici mais l'impact reste vraiment faible. Les poissons peuvent se retenir de sauter sur tout ce qui bouge tellement ils ont à manger mais la densité est incroyable. Puis, pour rassurer tout le monde c'est le dernier jour que nous toucherons le plus de poissons sur des secteurs déjà faits.











A vue !
Sur une fin de matinée Julien nous amène à la sortie d'une petite crique. De l'eau plus fraîche arrive de la jungle laissant à chaque fois en son confluent une petite plage de sable blanc. 
Outre le côté vraiment jolie de la chose on a aussi l'occasion d'y voir un peu plus. L'eau étant couleur thé c'est impossible de pratiquer une pêche à vue .. Enfin à part quand les poissons sont en surface ou posés sur les bancs de sable clair. 
Arrivé sur la zone en mode sioux on voit un joli poisson partir. Malgré nos efforts d'approche il nous a vu mais un autre aïmara tout noir arrive de nul part et se cale sur la plage. J'envoie mon leurre souple juste derrière lui. En une fraction de seconde il se retourne et fonce sur le leurre ! Je ferre comme un bon bourrin et c'est parti pour un combat bien puissant dans peu d'eau ! C'est la folie sur la pirogue ! Une action gravée dans nos mémoires halieutiques !

Privilégiez la surface
C'est clair pour tout le monde, rien ne vaut une attaque en surface ! J m' y suis attardé le matin sur les zones bien à l;ombre. Sur la fin du séjour j'ai aperçu au fond de ma boîte la SG 3D Bat ; grand modèle. Un crawler à ramener bien lentement et qui de part sa taille imposante met un sacré barouf dans l'eau. 2 ème lancé et BAAAMMM explosion, arrachage de bras et décroche !! RRRRRRrrr ça promet... Je ramène le leurre dans un sale état. Les ailes sont toutes tordues mais quelques secondes plus tard la voilà qui re-nage. Je lance dans un tout petit poste bien sombre. Entre une grosse roche et un bois mort. 
Laissant la chauve souris remonter je ramène tout tranquille et BOUMMM ! Explosion, je retarde bien le ferrage que je renvoie bien fort ! Cette fois c'est piqué ! Le simple sans ardillon est piqué juste à la pointe de la lèvre ! Chandelles dans la brume, les coups de têtes sont hyper puissants ! Quel réveil ! Un magnifique poisson aux marbrures sublimes !



Premier big !
Il y a eu un fish sur ce séjour qui m'a mis un combat hors norme. C'était le premier +10kil car oui j'ai eu la chance d'en farcir 6 mais celui là était fou ! Un lancé parmi tant d'autres au raz du bord et boommm ça part de travers, le DA bush a encore frappé mais c'est du sérieux. J'ai la canne en 300gr, le Komodo et tout ce qu'il y a de plus rassurant mais quand je me rend compte que Julien hallucine du combat je m'attends à un poisson de plus de 15 kilos. Il arrive a prendre du fil, à la verticale sous la barque. Je kiche comme un âne et franchement je n'imaginais pas devoir forcer autant sur un aîmara ! Cette canne il en faut beaucoup pour la plier et elle l'est au max ! Avec autre chose niveau matos c'est le poisson qui aurait gagné ! Après des minutes intenses il est enfin à l'épuisette ! Quelle bagarre je n'en reviens pas ! Le spinner est détruit, hameçon ouvert... HS....


Des journées galères !
Comme partout dans le monde il est possible de tomber sur des périodes où l'activité est nulle. Difficile d'expliquer pourquoi mais il ne se passe rien. Et, sur un séjour pêche c'est pas évident à accepter . Ça nous est arrivé sur une journée avec pas mal d'averses. Que faire ? Aller se reposer ? NON !! Avec Alex on est resté bien concentré ! C'est au milieu d'arbres morts avec un gros lipless que je prendrai la cartouche mémorable de la journée ! Un combat de ouff, sous la pluie, genoux contre la coque. Une touche et un poisson exceptionnel, comme tous ceux qui dépassent les 10 kilos, et la journée s'achève. Comme souvent dans ces conditions c'est le mental qui fait la différence ; avec je l'avoue de la chance et à la pêche il y en a toujours un certain pourcentage.
Un monstre, non un rêve...
Comme je vous le disais c'est le dernier jour qu'il y a eut le plus d'activité.
Alors que nous étions dans le doute avec une baisse des prises sur 2 journées consécutives les poissons se sont simplement mis à table. Beaucoup de ratés, de décrochés et évidement de poissons à l 'épuisette jusqu'à cet arbre. Pêché à chaque dérive mais proche d'une crique donc avec un potentiel certain.
Je suis sur un montage un peu improbable composé d'un des derniers morceaux de leurres souples monté en texan suivi d'une palette pour de la vibration. Je laisse couler cette horreur au milieu des branches jusqu'au contact. La cloche sonne ! BANNNGGGG!!!!C'est lourd, très lourd et c'est évidement derrière un gros tronc... 
Rrrrrr Alors c'est parti en burnerie avec un treuillage de maboul ! J'arrive à le faire monter, il paraît énorme ! Poussez madame !! Et le voilà glisser par dessus le tronc, on dirait un silure!! Il me remet un rush, puis un deuxième et là nous envoie une magnifique chandelle devant la barque de quoi stresser à bloc ! Alex est agrippé à l'épuisette et sur un superbe coup de poignet laisse entrer l'engin dans la filoche... Là on est d'accord ; on a un monstre ! Quel soulagement!!!
Du pure délire à bord de quoi fêter tout ça dans l'eau fraîche de la crique. L'endroit est juste parfait pour immortaliser ce moment ! Quelle largeur, quelle puissance émane de ce poisson. Les photos ont même du mal à faire ressortir ce que l'on voit, ce que l'on ressent . C'est lourd et le peson est bloqué à 12 kilos, il fait donc bien plus mais au final peu importe les chiffres. Nous sommes admiratifs devant la robe de l'animal. Je le tiens dans l'eau, le soulève le temps de l'image puis d'un soubresaut de la caudale il m'envoie reculer à 1mètre. Il se cale sous la barque. Bien inconscient je l'ai filmé à la go pro et en regardant les images je ne suis pas passé loin de la correctionnelle car ce poisson est tout simplement capable de vous attaquer.
Heureusement cela ne s'est pas produit mais le rappel est bien là. Ici on ne rigole pas.







Même si nous avons évité la bocagrip pour impacter le moins possible les aïmras les gestes doivent être justes. L'erreur n'est pas acceptable ici loin de tout. J'ai fais le choix de pêcher uniquement en hameçons simples et sans ardillon et je n'ai pas eu plus de décrochés ! Ce poisson étant extrêmement difficile à ferrer il me semble simple à comprendre qu'un triple n'est pas mieux qu'un simple qui offre une hampe plus large et donc moins de faciliter à s'extirper du crochet. Nous avons pu vérifier que ce poisson est capable de mener un combat entier ; jusqu'à l 'épuisette sans être piqué ! Fou non ? On peut donc imaginer que nombre de décrochés sont juste des « non piqué » qui finalement ouvrent la gueule... C'est un truc de fou! 
Quel poisson ; je vous l'assure il est dingue ! 
Cette semaine était magique, cet endroit, ces poissons... On prend conscience de plein de choses là bas et j'espère du fond du cœur qu'il restera comme il est; ce paradis des aÏmaras
Merci à Julien et Ronan pour le taf accompli, tout se passe tellement bien qu'on en croirait que c'est simple! Merci Alex Morgan Adrien et Enzo !! On s'est vraiment bien marré et que de souvenirs!!! 
Merci Adrien et DHD d'avoir repris la destination et je le redis, c'est le paradis des AÏMARAS!














La jungle ; cette forêt primaire, ses habitants, ses odeurs , ses sons mais aussi sa vulnérabilité, son équilibre aussi vieux que fragile; autant de facteurs qui rendent cette destination incroyable avec à la clef un monument de muscles d'écailles et de dents acérées. Tout au long du retour je me suis dis qu'il me faudra absolument y retourner.


Si tout ce passe bien et que cette pandémie se stoppe ce sera en septembre prochain (13/23). N'hésitez pas à me contacter si vous souhaitez m'accompagner (MP sur facebook)

Bon courage à tous !!!!